Noël à Saigon
Pour quitter Can Tho nous franchissons le plus grand pont à haubans d’Asie du Sud-est, enjambant le Bassac (un bras du Mékong) sur 550 mètres. Avec ses tours de 174 mètres de hauteur, ses montées et descentes, il laisse une vive impression. Inauguré en 2010, il a coûté la vie à plus de cinquante ouvriers lors de sa construction suite à l’effondrement d’une travée.
Les cinq heures de bus de Can Tho à Saigon sembleront interminables tant les routes défoncées font sursauter le bus et ses occupants provisoires. Manu écope d’une place fabuleuse, tout au fond du bus, à côté d’un allemand volumineux, et derrière un Américain tout aussi enrobé dont le 
siège s’enfonce peu à peu jusqu’à ne laisser aucune place pour les jambes. Mais le must de l’affaire est que le siège est cassé et se replie comme un strapontin à chaque nid de poule, ce qui sera tout de même l’occasion des bonnes rigolades. L’arrivée de nuit à Saigon, désormais nommée Hô Chi Minh - ville, est fascinante. Le déluge de lumières, les hautes tours et les écrans géants laissent penser que cette mégapole de plus de 7 millions d’habitants ne s’endort jamais.
Dans le quartier routard, nous nous installons dans un petit hôtel, et une petite chambre qui sera notre refuge pour les fêtes de Noël. Car, pour l’occasion, Saigon sort le grand jeu et les rues décorées scintillent de mille couleurs. Les centres commerciaux rivalisent d’ingéniosité pour offrir la féerie de Noël à la foule nombreuse qui se presse près des vitrines. Les filles en tenue de soirée posent comme des mannequins devant des rennes coiffés d’ampoules ou des bonshommes de neige que les 35°C ambiants ne déstabilisent pas. Le top du chic reste toutefois d’avoir un masque antipollution assorti à sa robe, genre modèle en dentelle ou, pourquoi pas, un Lacoste !
En grimpant au 50e étage de la tour Bitexco, nous découvrons une ville qui s’étend à perte de vue sous un ciel splendide. Les petits hommes en bas vivent dans une frénésie constante, ne tirant pas tous le même bénéfice d’une course à la modernité. En voyageant autour du monde, on a souvent cette impression de tout voir d’en haut, comme des spectateurs d’un monde où le meilleur côtoie souvent le pire, ici comme ailleurs.
À la nuit tombée, il semble que la moitié de la ville se promène en scooter et l’autre à pied. Les départs de feu vert font penser au marathon de New York et la traversée des rues à une sorte de pari risqué au milieu des embouteillages 100 % deux-roues. L’ambiance est bon-enfant et les gens s’arrosent de neige artificielle. À quatre sur un scooter, les enfants en costume rouge et blanc, la famille vietnamienne resserre ses liens dans le quartier luxueux de la cathédrale de briques rouges.
Pour le réveillon, nous nous offrons le luxe d’un steak-frite dans un resto, une glace dans un autre, une tarte au « Paris-baguette », et une barbe à papa dans la rue. Ca change un peu du "pâ thé" et des œufs "opla". Les enfants découvrent le lendemain matin au pied du sapin en papier qu’ils ont colorié leurs cadeaux « miniatures », sac à dos oblige.
Le 25 décembre, nous assistons à un spectacle de marionnettes sur l’eau. Les instruments et les voix de 6 musiciens jouent en direct la bande-son d’un spectacle 
vieux de plus de 1000 ans où dragons, poissons et personnages racontent une histoire dont on ne saisit que les grandes lignes, ayant quelques lacunes en vietnamien.
Nous achetons ici un billet de bus dit « open ticket » nous permettant de rejoindre Hanoi en plusieurs étapes aux dates que l’on choisit, solution moins onéreuse que le train que nous pensions utiliser en premier lieu. C’est donc de nuit que nous rejoindrons par bus la station balnéaire de Nha Trang.
